29 juillet 2016

La "Galaxie" des femmes qui veulent libérer l'Iran

Par : Simin Nouri
Architecte franco-iranienne, présidente de l'Association des Femmes Iraniennes en France

LE HUFFINGTON POST, 16 juillet 2016 : Alors que toute la France attendait impatiemment la finale de l'Euro 2016 et que l'Amérique plongeait dans une crise majeure d'ordre raciale, un événement encourageant et plein d'espoir se déroulait sous un soleil battant le samedi 9 juillet près de Paris.

Plus d'une centaine de milliers d'Iraniens venant surtout d'Europe et des Etats Unis avec leurs supporteurs s'étaient donné rendez-vous au Bourget où près de six cent personnalités de tous bords des cinq continents les attendaient.

Un an après la signature de l'accord sur le programme nucléaire iranien, le rassemblement "kahkeshan" ("galaxie" en persan) de l'opposition iranienne, qui se déroule à cette époque chaque année depuis treize ans, a eu cette fois une couleur particulière, avec ce message principal: "nous nous engageons à libérer l'Iran".

D'un côté, une foule d'opposants syriens au régime de Bachar Assad venus protester contre la barbarie de deux dictatures alliées dans la guerre en Syrie, et de l'autre, la présence massive de femmes aussi bien dans l'assistance que parmi les personnalités (politiques, ministres, parlementaires, maires,...) était impressionnante. D'Ingrid Betancourt à Rama Yade en passant par Sylvie Fassier, maire de Le Pin (Seine-et-Marne) et Evelyne Yonnet, sénatrice de la Seine-Saint-Denis... Bref, un grand meeting rarissime, pour dénoncer les atrocités dans ces deux grands pays dont les dirigeants ont plongé le Moyen-Orient dans une crise sans précédent qui menace non seulement la sécurité des pays de la région, mais chaque jour un peu plus celle de l'Europe: attentats terroristes, flot de réfugiés fuyant la guerre et crises politiques et économiques successives qui en découlent pour s'ajouter aux problèmes d'une Europe déjà en difficulté.

Dans la foule, d'anciennes détenues politiques et familles de prisonniers ont apprécié le soutien, surtout moral et politique, des personnalités françaises et d'autres nationalités à leur cause. L'émotion était à son comble lorsque des messages de solidarité venus d'Iran ont été diffusés. Des Iraniens, une rose rouge à la main mais visage caché, déclaraient depuis les villes et les villages de la Perse, leur soutien aux participants et à leur "engagement pour un Iran libre", acte qui pourrait leur coûter la vie sous la dictature des mollahs.

Elles ne s'étaient pas revues depuis neuf ans. Paria, 18 ans, a quitté l'Iran clandestinement en août dernier. Zahra, son ainée de trois ans, de passage en France, est sortie du camp de réfugiés qui abrite les opposants iraniens en Irak. Le père de ces deux jeunes femmes, devenu l'un des prisonniers politiques les plus célèbres d'Iran, passe à l'heure actuelle, sa dixième année de détention à la prison de Gohardacht près de Téhéran.

Interrogées sur place par la presse, Paria et Zahra ont raconté leurs douloureux parcours personnels pour avoir choisi la voie de la lutte contre une dictature théocratique, tout en faisant preuve d'une détermination étonnante de résister jusqu'au bout contre le régime ultraviolent et misogyne des mollahs au pouvoir en Iran.

C'est ainsi qu'elles expriment la volonté de continuer à communiquer « la voix de la jeunesse iranienne » au reste du monde. Une jeunesse qui aspire plus que jamais à la liberté, la démocratie et la justice tout en sachant qu'elles ne sont pas "données" alors que l'on vit sous une dictature féroce, mais désormais chancelante. Tout le contraire de certains médias occidentaux qui voudraient donner l'image passive d'un obscur mollah qualifié de "modéré" qui viendrait ouvrir leurs cages par charité!

Les dizaines de milliers d'hommes et de femmes, jeunes et moins jeunes, rassemblés au Bourget ce samedi 9 juillet, ont chanté et dansé au rythme de la musique iranienne et celle des pays représentés au meeting. Ils ont écouté leur dirigeante emblématique, Maryam Radjavi évoquer Brecht: "Résiste, toi en exil! Résiste, toi en prison! Résiste, femme en ta maison! Toi sans abri, toi qui a froid, toi qui a faim, résiste! Tu dois prendre la tête". Ils ont écouté son message d'espoir: "Oui, une ère nouvelle pointe à l'horizon où s'épanouira une société fondée sur la démocratie et la séparation de la religion et de l'Etat, ainsi que sur l'égalité des femmes et des hommes"; ils ont applaudi leurs héros montrant au monde entier une belle image de la solidarité humaine contre les tyrans qui sévissent toujours hélas sur notre planète.

Les mollahs qui chaque jour voient l'érosion de leur régime ont saisi le message que leur temps est révolu, c'est pourquoi ils ont réagi violemment par des invectives haineuses et des menaces, mais n'est-ce pas là un signe flagrant de leur faiblesse?