25 octobre 2006

Maryam Radjavi marque des points

© La Libre Belgique 2006
Gérald Papy
25/10/2006
L'opposante au régime de Téhéran a été reçue au Sénat. Une visite non officielle qui a tout de même irrité Téhéran et a valu une convocation de l'ambassadeur de Belgique. Mme Radjavi plaide pour le retrait de son organisation de la liste noire de l'UE.


Le vent tourne pour Maryam Radjavi. La "Présidente de la République élue du Conseil national de la Résistance iranienne" (CNRI), fédération d'organisations opposées au pouvoir à Téhéran, redevient en odeur de sainteté à mesure que le régime du président Ahmadinejad se révèle de plus en plus infréquentable. Une preuve en a été fournie mardi avec l'accueil qui lui a été réservé au Parlement belge.
Le principe même de sa visite était sensible. Maryam Radjavi est aussi la dirigeante de l'organisation des Moujahidine du peuple (MKO), groupe armé inscrit sur les listes des organisations terroristes de l'Union européenne et des Etats-Unis. Un paradoxe, en particulier pour l'administration Bush particulièrement déterminée à affaiblir le régime iranien. Recevoir celle qui pour certains Iraniens est une icône de la résistance posait donc un problème diplomatique.

Hervé Goyens, l'ambassadeur de Belgique à Téhéran, se l'est fait rappeler, dimanche, quand il a été convoqué au ministère iranien des Affaires étrangères. Le gouvernement iranien a exprimé toute l'hostilité qu'il ressentait à l'idée que "sa bête noire" se voit dérouler le tapis rouge au Sénat belge. L'idée de la rencontre avec Maryam Radjavi émanait en effet de sénateurs, en tête desquels figure Patrik Vankrunkelsven, membre du même parti, le VLD, que le Premier ministre Guy Verhofstadt.
Néanmoins, certaines précautions ont entouré cette visite. Visite à l'initiative de quelques parlementaires et non officielle, soulignait mardi Rudy Huygelen, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, insistant sur la séparation des pouvoirs entre le gouvernement et le Parlement et sur la liberté d'initiative des sénateurs. Mme Radjavi avait du reste déjà été reçue ces dernières semaines au Parlement européen, à Strasbourg.

Visite non officielle donc, mais tout de même rehaussée par l'accueil de la présidente du Sénat Anne-Marie Lizin, à titre personnel. Mme Lizin avait d'ailleurs déjà rencontré la dirigeante du Conseil national de la Résistance iranienne, la veille, sur la route entre Paris et Bruxelles, "à la frontière franco-belge", par un de ces incroyables hasards qui pimentent l'Histoire. C'était du reste la première fois depuis plusieurs années que Maryam Radjavi quittait officiellement la France, après des années de limitation sur décision de la justice française de ses activités politiques.

Un argument désuet
A l'issue d'une rencontre avec plusieurs sénateurs et députés, toutes formations politiques confondues, c'est donc satisfaite de ce tour joué au gouvernement iranien que la dirigeante du Conseil national de la Résistance iranienne s'est exprimée devant la presse. Elle a surtout dénoncé "la politique de complaisance des Européens" à l'égard du régime de Téhéran. Or, cette politique a échoué, a insisté l'opposante iranienne, se référant au constat d'échec acté par le Haut Représentant pour la politique extérieure de l'Union européenne, Javier Solana, sur le dossier nucléaire. Après des mois de discussions avec l'aval des Etats-Unis, la troïka européenne (Allemagne, France, Royaume-Uni) n'a obtenu aucune concession de la part du régime iranien en matière de suspension de l'enrichissement d'uranium, potentiellement utile pour le développement de l'arme atomique. Maryam Radjavi a donc naturellement plaidé pour le retrait de l'organisation des Moudjahidine du peuple de la liste noire des organisations terroristes de l'Union européenne, rappelant que cette stigmatisation, surtout aux Etats-Unis, avait été utilisée comme arme politique à l'égard du régime iranien alors que, sous le précédent président, réformateur, Mohammad Khatami, l'Iran donnait encore des signes d'une possible ouverture. Cette tendance ayant été balayée de toutes les strates du pouvoir iranien, la démonstration de Maryam Radjavi n'est pas dénué d'arguments.
L'opposante a aussi plaidé pour des sanctions sur la forme d'"un embargo sur les armes, la technologie et le pétrole " à l'encontre du "régime des mollahs ", espérant encore que l'exemple de la Corée du Nord encourage la communauté internationale à réagir de la même façon envers l'Iran.

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